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le coq à poil

21 septembre 2023

Je me réveille avec un premier étonnement, la

Je me réveille avec un premier étonnement, la nuit fut bonne. Sans doute est-ce dû à l’intense effort physique d’hier, sac au dos, à vélo jusqu’à l’hypermarché, à deux collines d’ici. Aller quinze kilos plus léger qu’au retour. Je suis revenu en sueur, les muscles durs et le souffle à la louche. La récupération nocturne et horizontale a relâché mon corps, j’ai donc bien dormi. Je me lève de bonne humeur, malgré le jour que je sais du plus monstrueux anniversaire. J’ouvre les rideaux. Un spectacle incroyable me saute aux yeux : une lumière coule du soleil comme un sabre d’or et tranche la cape mauve menaçante de pluie. Un incroyable arc-en-ciel à double carapace me fait un signe juste au-dessus de la haie.

Ma femme me salue, cinq ans après sa mort.  

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26 août 2023

Une semaine avec Yuten Sawanishi, ami et écrivain

Une semaine avec Yuten Sawanishi, ami et écrivain japonais, professeur de littérature à l’université de Kyoto. Nous échangeons l’un et l’autre dans un anglais très moyen. Ses gutturales sont inexistantes, mes constructions grammaticales tremblent sur leurs échafaudages. Il nous arrive d’éteindre l’étincelle de la compréhension dans nos conversations. Je lui montre mon pays que je connais si mal. L’Agneau Mystique à Gand, le béguinage de Bruges, la Mort-Subite à Bruxelles, St-Loup à Namur. Nous passons une après-midi entre les vallées du Condroz à la recherche d’un village qu’il a inventé dans son premier roman « Le village des flamants ». Il a imaginé un hameau du 19ème siècle près de la Meuse, composé de 30 familles ayant des relations avec des flamants roses, sauf un habitant qui préfère faire l’amour avec un chien. Après avoir tournicoté durant des heures, Yuten semble satisfait du hameau de Haltinne avec son château rouge entouré de douves pour accrocher de l'existence à son imagination.

En plus de la passion pour la littérature, ce sont nos goûts pour les mêmes livres qui nous rapprochent. Et puis ce constat, dès qu’il raconte une anecdote, il trouve les mots précis, sans aucun déchet, pour rendre le récit fascinant. Aucun pathos, ni effet de style, uniquement la justesse et l’honnêteté. Le résultat est toujours une histoire d’une incroyable qualité.  À la fin de son séjour, j’ai l’impression d’avoir écouté un recueil de nouvelles japonaises de très haut niveau.

                                                                            *

Genre d’histoires racontées par mon ami japonais.

Il y a des métiers bizarres. Lorsqu’il avait 20 ans, Yuten travaillait comme gardien de nuit dans un hôpital de Kyoto ayant la réputation d’héberger des fantômes. Sa principale fonction était de prier les curieux, souvent étudiants comme lui ou fêtards, de ne pas pénétrer dans les couloirs, à la recherche de revenants et autres apparitions d’ectoplasme. Parfois, vêtu du tablier blanc, et marchant lentement avec des mouvements saccadés, le vigile effrayait suffisamment les badauds amateurs de zombis pour les faire détaler. Cela dit, ajoute-t-il, ce job offrait de longs moments de pause pour écrire ou dormir. Une fois, alors qu’il était étendu sur le lit dans sa pièce de repos, un spectre au contour vert lumineux est venu le secouer violemment. Un patient venait de mourir en chirurgie, conclut-il.

21 juillet 2023

Le plus impressionnant ne fut pas leur potager,

Le plus impressionnant ne fut pas leur potager, contenant plus de 110 espèces de tomates différentes (dont la minuscule champagne, très sucrée, et la F1 Gigantomo menaçante comme un cancer de la gorge), ni qu’ils confisaient eux-mêmes leur ail noir en le cuisant deux mois non-stop à 60 degrés, ni que ces jardiniers aux doigts verts étaient de véritables descendants de Louis VI, dit "le gros" ou "le batailleur"… Non, le plus impressionnant fut leur coq gentleman, Brutus, un splendide gallinacé français au plumage glorieux, entre serpes noires, collerette en or recouvrant le poitrail bleu royal, qui appelle ses poules à l’heure de table, ne mange jamais avant elles et dépose devant sa favorite, un par un, les grains à picorer.

27 mars 2023

Un animal sauvage vient me saluer tous les

Un animal sauvage vient me saluer tous les matins. Ce n’est pas que je me méfie des étrangers mais, tout de même, ce mammifère fait comme s’il était chez lui, broutant l’herbe et les ronces à deux mètres de la terrasse, jaugeant de ses grands yeux noirs mon inoffensivité. Je me sens humilié d’être démasqué si facilement. Comment sait-il que je ne suis pas un féroce chasseur qui le tient dans son viseur ? Peut-être, après tant de visites, ce chevreuil a-t-il conclu que mes regards émerveillés étaient une invitation au rapprochement.

La façon traditionnelle de mourir dans la famille des cervidés est rapide, d’une décharge de plombs. Qui sait si cette certitude de l’exécution n’a pas transformé, de génération en génération, le gibier en philosophe.

3 mars 2023

Première fois dans un vaisseau spatial. Ou

Première fois dans un vaisseau spatial. Ou presque, une voiture électrique de luxe, silencieuse et puissante, le tableau de bord simplifié de la console de jeu, partout des boutons lumineux rose et bleu. C’est le traineau du père Noël en design soucoupe volante. Pour conduire cela, il faut suivre une formation de cosmonaute.

Son coût : plus cher que ma maison au Mexique. Je suis sidéré.

C’est alors que le chauffeur qui m’a pris en stop me signale:

_ L’ennui, c’est son autonomie, seulement 270 kms. Puis il faut 5 heures de recharge. Pour aller au ski, c’est 3 jours aller, 3 jours retour. Avec les enfants, c’est compliqué, ils n’ont qu’une semaine au carnaval.

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1 mars 2023

Dans l’autobiographie que je n’écrirai jamais, et

Dans l’autobiographie que je n’écrirai jamais, et qui pourrait s’intituler, « un peu de sel » il y aurait ces lignes :

Hier, j’ai reçu la visite de mes sœurs. Elles m’ont, chacune, menacé de mort. La première exécutait sa menace si je perdais les clés de l'appartement qu'elle s'apprêtait à vendre et l'autre me condamnait pour ne pas avoir abaissé la planche de la cuvette.

On risque sa vie à tout moment.

16 janvier 2020

Je viens de m’arracher des poils d’oreille. Signe

Je viens de m’arracher des poils d’oreille. Signe indiscutable que je me transforme en vieillard.

27 octobre 2019

Cancun, la mer transparente des Caraïbes, le

Cancun, la mer transparente des Caraïbes, le sable blanc qui ne brûle pas. Nous allons sur la plage des dauphins en fin de matinée sous de petits nuages. Le premier dans l’eau se rend compte que les vagues sont joyeuses. Mes filles me rejoignent et nous ressemblons à des bouchons de canne à pêche en yoyo dans l’eau. Et puis il y a cet instant où l’on se rend compte qu’un courant nous éloigne de la plage. Les vagues sont plus violentes, elles nous épuisent, nous n’avons plus pied. On met trop d’énergie pour sortir la tête de l’eau. Rapidement une légère panique nous prend tous les trois. Lucile est plus proche de la plage mais le courant l’éloigne sur le côté. Je vois dans les yeux d’Elise qu’elle n’en peut plus. Moi-même j’ai bu trop de tasses et bien que faisant près de deux mètres je ne touche pas le fond. Je parviens à prendre la main de ma fille cadette. Sans force, Elise me dit : « Ne me lâche pas ». J’appelle à l’aide plusieurs fois en avalant quelques verres de mer. Je vois sur la plage des gens nous regarder, une femme courir vers une cabane. La mort est très proche. On la sent dans l’abandon des forces. Mon autre fille réclame aussi du secours à 30 mètres mais je ne l’entends presque pas. Mon corps monte et descend, mes orteils frôlent le sable. Puis, dans un ultime effort, j'exerce en touchant le fond une contraction des genoux comme si j'essayais de sauter en poussant mon corps en oblique vers la plage. En remontant, je tire ma fille vers moi d’un geste brusque. Je recommence sans voir de résultats. Il semble tout de même que je touche un peu plus le sable. Après une dizaine de ces mouvements automatiques, je marche la tête hors de l’eau en remorquant nos deux épuisements. Nous parvenons sur le rivage tandis que mon autre fille de 18 ans réclame encore de l’aide. Heureusement elle aussi semble marcher maintenant. Grosse douleur dans la poitrine, je m’allonge auprès de ma cadette devenue soudainement muette. Lucile nous rejoint rapidement, je m’en veux tellement de n'avoir rien pu faire pour l'aider et qu’elle se soit sauvé seule. Océan, tu ne voulais pas peut-être nous tuer. Mais que voulait dire cette épreuve?

15 octobre 2019

Un des plus beaux mammifères du jeu de domino est

Un des plus beaux mammifères du jeu de domino est sans aucun doute la mouffette. Noire avec une ligne blanche sur le dos, elle semble avoir été fabriquée au milieu d’une route en goudron. Corps large sur des petites pattes, le nez relevé du parfumeur, ce petit carnivore avance maladroitement. Sa rencontre ne porte pas autant chance que marcher dans une crotte. Surtout si on vit avec deux imbéciles de chiens adorables qui, pour défendre le foyer, se disent : « combattons cet ennemi poilu ! » Et deux contre un, les dents longues contre le spray pestilentiel, le pauvre animal n’a aucune chance. Mais alors, alors, en un instant, la maison pourtant située à plus de 20 mètres devient inhabitable. Un mélange de vieil oignon, de café et de sueur aigre à vomir envahit toutes les pièces. Je suis prêt à déménager sur-le-champ. A baigner chacun des objets de la maison dans la purée de tomates (le seul remède paraît-il). Nous allumons tous les ventilateurs, rien n’y fait. Durant deux jours, pour survivre, nous éteignons le sens de l’odorat, Et pour couronner le tout, dans un présage lugubre, sept vautours se relaient autour du cadavre puant en passant leur grande ombre sur la maison comme une faux volante.

14 mai 2019

Comment gâcher sa générosité. Ce matin, en allant

Comment gâcher sa générosité.

Ce matin, en allant acheter des viennoiseries, j’aperçois à quelques mètres de ma voiture, un vagabond assis par terre contre une gouttière, pieds nus et noirs, pantalon à trous, emmitouflé dans une couverture grise à carreaux, de celle qui pique.

Ma bonne intention n’hésite pas. Il y aura un petit pain pour ce malheureux. Et je m’en félicite de suite. Ne suis-je pas de tradition chrétienne ? Il me semble que les nuages m’approuvent. 

Mais au moment où j’offre le petit pain à ce pauvre errant, j’évite son regard et baisse les yeux, humiliant son humanité. Je me déteste aussitôt. En regagnant ma stupide voiture, je me promets d’écrire ce récit infâme pour souligner à jamais ma médiocrité.

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